vendredi 27 juin 2008

Conjointement seuls.

Le modèle de société occidentale a un côté qui me semble particulièrement bizarre.

Avec la nouvelle conception de la ville, où la densité de la population devient de plus en plus importante, on devrait se sentir de moins en moins seul, non? Surtout que les bals, festivals, dîners, spectacles, réceptions, etc. s'organisent continuellement.

Pourtant, c'est tout à fait le contraire que je crois discerner:

Dans les rues, une foule de gens seuls, déambulant dans tous les sens. Chacun cherchant sa route, avec sa vie, ses soucis et ses pensées particuliers.

Au bureau, pas mieux. Chacun à son poste, s'attellent à boucler son dossier. (bon, se vre ke Ayiti poko fin rive nan stad sa a).

À l'église? Encore pire. Chacun faisant face au célébrant, le regardant sans vraiment le voir. L'écoutant sans vraiment l'entendre. Quant aux «baisers de paix», on n'y retrouve plus de baisers. Plus rien à part une nonchalante rencontre des paumes ou des doigts.

Le carnaval, qui pourtant se veut être une grande communion de toutes les classes sociales, n'y échappe pas non plus. Nous y allons, dansons, chantons et gueulons avec un océan d'inconnus pour en revenir sans avoir fait la rencontre d'aucun d'entre eux.

Nos rassemblements deviennent des assemblages, juxtapositions d'individus; et tous, ensemble, nous restons dans la commune solitude.

Tilou

vendredi 20 juin 2008

T.G.I.M.

Le vendredi est le jour préféré des employés. Il n’est pas nécessaire de chercher l’explication trop loin : c’est le dernier jour de travail de la semaine, tout simplement.

Et dans la même logique, le lundi devient le jour le moins aimé. Allez-y, faites un petit sondage autour de vous. Au bureau. À l’école. Même chez les chômeurs, semble-t-il, le lundi est détesté.

Et je ne déroge pas à la règle (pour une fois ?). Je hais le lundi. Premier jour de bureau. Premier jour de travaux forcés. Avec à sa suite 4 autres jours de bureau. 4 autres jours de travaux forcés. Non, vraiment, lundi n’est pas un jour que j’aime.

J’en arrive même à ne pas aimer le dimanche à cause de ça. Trop proche du lundi. Parce qu’en fin de compte, le dimanche soir c’est comme le lundi matin. Et le dimanche matin aussi d’ailleurs. Tout comme le samedi et le vendredi.

Du coup, le jour idéal est celui le plus éloigné possible du premier jour de travail. Ce jour c’est le lundi ! J’aime donc le lundi parce que c’est le jour le plus éloigné du lundi prochain.

Tilou

vendredi 13 juin 2008

Blah ! Blah ! Blah !

À écouter les chansons contemporaines, on finirait par croire que les hommes d'aujourd'hui sont très amoureux. Les textes chantant la beauté de la convoitée, les charmes de la dulcinée ou l'indispensabilité de la bien-aimée; ne se comptent plus.

Ils s'en donnent à cœur joie : «Mwen renmen ou alafoli». «Se ou ki tout lavi m’», «Ou se sèl fi nan lavi m». «Map toujou la pou ou»,...

La réalité, cependant, est toute autre: la plupart des musiciens sont de véritables coureurs de jupons (ou plutôt coureurs de leurs emplacements : les jupons n'existent plus). Leurs couples ne durent pas longtemps et leurs compagnes de nuit sont innombrables.

Cette différence entre ce qui est proclamé et ce qui est donné en exemple ne se vit pas seulement chez nos amis musiciens. Nous en témoignons presque tous.

Lors de nos mariages, nous promettons fidélité. Combien d'entre nous le restons vraiment? Nous nous engageons pour la vie, pour «le meilleur et pour le pire», disons-nous. Mais au premier obstacle, nous recourons au divorce pour «incompatibilité de caractères»: L’incompatibilité des caractères serait-elle encore pire que le pire? (Et ces cas deviennent si fréquents que je me demande s'il ne serait pas mieux de faire des mariages à durée limitée: 2 ans, 3 ans ou 5 ans renouvelables).

Et la pauvre Bible…!?

Nous sommes presqu’unanime à reconnaître qu’elle est source de vérité. Peu d’entre nous cherchent à savoir ce qu’elle dit vraiment.

Et lorsque nous le faisons, c’est pour certifier: «Labib di…, Labib di…» et ensuite ne suivre que le contraire de ses recommandations.

Nous enseignons à nos enfants que mensonge n'est pas bien. Nous leur mentons aussi souvent que nous les embrassons.

Tout cela se vit pourtant normalement. Tout le monde chante sans mettre en pratique, sans même prendre le temps d'écouter ce qu'il chante.

Nous fêtons Dieu, les enfants, la femme, les animaux et même la planète; sans donner de sens à ses fêtes qui du coup ne deviennent que des moments de répit à la routine insane de nos vies d’hypocrisie.

Tilou

vendredi 6 juin 2008

Parrrôôôlé...Parrrôlé, Parrrôôôlé...

S’il est une chose dont on doit se méfier c’est le mot.

Je ne tiens même pas compte de lorsqu’il est utilisé sciemment pour tromper, comme j’en ai parlé dans un précédent billet (voir Quand la Vérité sert à mentir). Non, je veux parler du mot lui-même, de son sens, sa signification.

On ne peut pas savoir, malgré le dictionnaire, le sens exact d’un mot prononcé par un interlocuteur. Et précisément parce qu’il n’a de sens que celui que lui attribue son utilisateur.

Prenons un exemple concret. Tenez! Le mot «concret», justement. Vous n’avez jamais entendu un politicien parler du «concret»? Il commence par dire:

«Il est temps que chaque citoyen sorte de la passivité pour que le pays se remette sur ses rails. Le journaliste demande alors:

- que lui faut-il donc faire?

- Il est temps qu’il cesse de se demander ce que le pays peut lui offrir, mais plutôt, ce qu’il peut offrir au pays.

- Vous avez parlé d’actions. Peut-on en avoir un exemple?

- Il lui faut agir positivement, en citoyen concerné

- mais concrètement?

- Il ne doit pas baisser les bras. Il doit être prêt à aider son pays et dire non à cet état de choses.»

Croyez-moi, quand j’ai écouté ça, mon regard sur le mot «concret» a vraiment changé.

C’est pareil pour le mot «signification» dont la relativité du sens est très bien illustrée dans un film*. Á un chanteur ayant récemment sorti un album on en demande le titre: «Piyanp, répond-il.

- Et quelle en est la signification?

(Régalez-vous)

- Bon. Comment vous dire?...Piyanp c’est...Comme si... quand tu regardes ce qui t’entoure...C’est...bon. Il ne faudrait pas non plus que ça soit mal interprété. Parce que certains pourraient croire que ça renvoie à quelque chose de négatif ou de malsain...loin de moi cette idée. En fait Piyanp, c’est...par exemple, quand tu regardes ce qu’il y a au plus profond de toi-même,...et que tu dis P I Y A N P...Comme si...En fait, l’album même n’aurait pu avoir de meilleur titre que Piyanp.»

Et à l’interviewer resté abasourdi, il conclut, tout fier: «C’est exactement ça.»

On n’est pas loin de laisser l’interlocuteur deviner le sens de nos phrases puis de trouver eux-mêmes les mots convenables.

Et attention... ça ne serait pas si mal. S’exprimer et comprendre quelqu’un qui parle relèverait de l’art:

En présence d’une belle vue sur la campagne nous nous exclamerions: «c’est Pythagore!» et à ceux qui exigeraient qu’il faille dire «pittoresque», nous rétorquerions que les deux mots sont «synagogue». Et qu’ils n’en conviennent pas nous serait complètement «équidistant» ou...«équilatéral».

Tilou

* Le dialogue qui suit n’est pas une reproduction fidèle de celui du film.