jeudi 25 mars 2010

Ras-le-bol !

Découragé par ce que je vis et vois autour de moi depuis le 12 janvier 2010, je m'étais résolu, sinon à rentrer dans le rang, tout au moins à ne plus m'opposer à ce qui (d'après moi) fait du tort au pays. Je m'étais résigné à arrêter mes sites et blogs de réflexions et de propositions. À quoi bon passer du temps à écrire pour que cela ne serve à rien? Voilà donc la raison de mon silence vendredi dernier : J’avais donc décidé de ne plus mettre en ligne «Les billets de Tilou».

Une amie, réputée pourtant pour avoir la tête ailleurs, m'a fait changer d'avis. On n’a pas le droit de renoncer à ses convictions. Me revoilà donc m'adressant à vous dans notre petit rendez-vous du vendredi; et pour partager avec vous mon ras-le-bol de l'état du pays.

Non, je ne pense pas aux dirigeants (ce n'est pas certain que ça servirait à quelque chose!). Je veux surtout toucher la grande majorité qui dénonce la corruption tout en s'y baignant; s’offusque du résultat des élections mais ne va pas voter; se plaint de la qualité des hommes et femmes politiques mais refuse que leurs proches, qu'ils savent compétents et bien intentionnés, essaient de changer la donne. Oui, je veux dénoncer ceux-là qui ne font rien de peur de risquer leur vie mais qui chérissent les grands pays dont les fils sont prêts à perdre les leurs pour que ça aille mieux.

Bon évidemment, je ne demande à personne de faire du « Mourir est beau » le refrain de sa vie. Mais, vous savez, certaines petites actions peuvent valoir autant. D’ailleurs, la Dessalinienne parle aussi de « Bêchons Joyeux ».

Par exemple, accepter de faire la queue comme tout le monde même si on a son « moun pa » parmi les responsables (sitou lè pa gen ijans pou sa); Respecter les lois de la circulation (mwen pap pale de espri zansèt yo non); et éviter de considérer les rues comme la poubelle du peuple. Oui, Je sais qu'avec toute la bonne volonté du monde, un seul citoyen ne peut rendre propre nos rues déjà chargées d'immondices. Mais ce citoyen, aussi seul qu'il puisse être, peut encore décider de ne pas contribuer à les salir.

Et, avec cet esprit-là : «Quand on ne peut pas faire le bien, évitons de faire le mal », en un rien de temps la perle se remettra sans doute à briller

Tilou

vendredi 12 mars 2010

Expert-tease

Depuis le 12 janvier 2010 (et oui, on n'est pas prêt d'en finir!) je me suis trouvé un talent: Expert. Eh oui. Je vous prierais maintenant de vous adresser à moi avec tout le respect dû à un expert.

Pardon? En quoi suis-je expert?

Euh. Je ne sais pas trop. En tout cas je le suis. Et au même titre que tous ceux-là qui prennent la parole à longueur de journée sur les ondes, ou qui offrent leur expertise quant à la vérification des bâtiments endommagés par le séisme.

Je suis en mesure de faire leur travail aussi bien qu'eux, vous savez! Et vu le court temps que j'ai mis à apprendre, par rapport à leurs longues années d'études et d'expérience, je dois vraisemblablement être un génie. C'est vraiment le cas de rappeler qu'"Aux âmes bien nés [moi :)], la valeur n'attend point le nombre des années."

Bon. Il faut avouer aussi que ce n'est pas trop difficile d'être expert. D'ailleurs, je soupçonne plus d'un d'avoir épousé cette discipline par et pour les même raisons que moi.(yo pran tiz!)

D'abord, il faut opiner avec un air sérieux sur le tremblement de terre du 12 janvier dernier et donner un délai pour que cesse les répliques. Quelques heures, 3 jours, un mois ou une année... ce n'est pas trop important. L'essentiel c'est d'avancer un délai qui pourra être allongé sans gêne s'il est dépassé. Et si on vous demande quand est-ce que les gens pourront rentrer dans leurs maisons, il n'y a qu'à répondre que c'est une décision personnelle.

Il faut aussi user des données statistiques comme si elles étaient incontestables. "3% de chances pour un séisme de magnitude 7" Ça ne veut strictement rien dire, mais avancer des chiffres donne toujours un peu plus de crédibilité.

Ensuite, et c'est le plus important, il faut pouvoir renseigner les pauvres victimes sur l'état de leurs maisons.

Et là encore, rien de compliqué. Si la maison est encore debout, c'est qu'il n'y a aucun danger. Il faudra seulement consolider la structure et réparer. C'est tout.

Comment? Vous n'aviez pas remarqué que c'est toujours le diagnostic? Les seules bâtisses déclarées vouées à la démolition sont celles déjà détruites. Celles que, sans aucune année d'études en génie, n'importe qui peut constater qu'elle n'est plus en état de servir. Après ça, toutes les autres sont "anfòm!"

Dixit les Experts en... (Ce n’est pas important!)

Tilou

vendredi 5 mars 2010

Miaw city

En Ayiti, les expressions «faire bon commerce» ou «être d’un commerce agréable» ne sont qu’oxymorons. Il est rare (pour laisser une marge d’erreur) qu’une transaction commerciale soit perçue comme une bonne entente.

Ce n’est pas comme j’ai pu en faire l’expérience dans d’autres pays où le vendeur reçoit l'acheteur avec un grand sourire et ce dernier règle sa facture avec un mot gentil.

Non, en général cela s’apparente à un duel. L’un soupçonne toujours l’autre d’un éventuel «koutba».

L’acheteur n’a jamais confiance en la qualité de la marchandise. Il l’examinera le plus méticuleusement que possible (ou que le permette le vendeur). Ensuite viendra la partie la plus sérieuse de la transaction : La contestation du prix.

Ce prix, annoncé par le vendeur, n’est jamais le bon (et sa a se pou tout bon). Le client devra donc estimer lui-même le montant en trop, faire la soustraction et proposé le prix qu’il croit juste. Évidemment, le vendeur n’acceptera pas la proposition du vendeur. En tout cas, pas du premier coup. Il renchérira une somme inférieure à sa première proposition mais bien plus importante que celle de l’acheteur.

Il faut aussi reconnaître que bien souvent, la contre-proposition de l’acheteur fait l’effet d’une insulte. Entendons-nous Proposer «venntwa dola» contre un corsage dont le prix est fixé à 100 dollars... Quand même !? N’est-ce pas accuser le vendeur d’escroquerie ?

Bon, ils finissent toujours par s’entendre. Mais même au moment de conclure l’affaire, la méfiance sera de mise.

L’acheteur fera mine de se résigner en regardant la marchandise avec dédain. En lui trouvant même quelques défauts si possible. Le vendeur lui examinera les billets qui lui sont tendus comme soupçonneux qu’il avait en face de lui un faussaire professionnel.

Mais tout le monde trouve tout cela normal. C’est moi qui suis bizarre de ne pas accepter que mes clients discutent mes prix. L’autre jour, j’ai eu même droit à une réprimande par un vendeur qui, malgré que je lui ais expliqué que je ne contesterais pas la valeur de son livre, n’acceptait pas de me donner le bon prix du premier coup.

On dirait vraiment que nous ne sommes qu’une bande de voleurs ne cherchant qu’à arnaquer le premier venu.

Tilou